Cession,reprise d'entreprise : l'exercice délicat du passage de relais

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Comment opérer le transfert de pouvoir d’un cédant à son successeur sans trop bouleverser les équilibres et risquer de mettre en péril l’entreprise ? Miser sur l’humain et prendre en compte les difficultés des salariés afin de prendre sa place permet de faire les choses en douceur. Analyse des différentes solutions qui s’ouvrent aux anciens et futurs dirigeants.

La transmission d'entreprise ressemble à une transplantation chirurgicale de tête : elle doit se faire très rapidement, sinon elle risque d'affaiblir l'entreprise.

La passation de pouvoir

Entre rupture et continuité, « la transmission est une partition musicale jouée d’abord en solo. Puis le dirigeant doit ensuite s’accorder, se synchroniser avec son successeur. A la moindre fausse note, c’est la fracture et les conséquences peuvent être lourdes sur la vie de l’entreprise », explique Chantal Prévost, psychologue et coach d’entrepreneurs.


Tutorat sur les 100 premiers jours

Depuis le 2 août 2005, la loi Jacob-Dutreil offre une prime de 1 000 euros bruts à tout cédant qui accepte d’accompagner son successeur. Le tutorat apparaît comme une solution de transition en douceur aussi bien pour les clients, les fournisseurs et les banques, qu’auprès des salariés. Pour ce faire, le cédant doit être prêt à coopérer sur tous les plans en étroite collaboration, à intégrer le repreneur à toutes les réunions et à le former à la psychologie de l’entreprise avant de se mettre définitivement en retrait. Par ailleurs, ce dispositif n’est efficace que s’il est bien encadré et qu’il ne dure pas trop longtemps. Selon Jean-Pierre Robin, délégué au CRA, cet accompagnement porte sur les 100 premiers jours : « Il s’agit d’une intervention chirurgicale : la "transplantation de la tête" doit se faire très rapidement, sinon l’opération risque d’affaiblir l’entreprise. 


Identifier les hommes-clés

Le repreneur doit disposer de 3 mois maximum pour intégrer le fonctionnement, la culture, et le passé de l’entreprise. « Chaque rôle doit être stable et défini contractuellement, explique Jean-Bernard Peylet. Le repreneur ne fait qu’observer et le cédant doit avoir une mission précise. Les salariés doivent bien sûr être mis au courant de ce dispositif transitoire. Le but est de s’immerger dans la vie de l’entreprise tout en prenant du recul. Cet aménagement évite que le nouveau dirigeant prenne des décisions hâtives et brise les piliers de l’entreprise sans en avoir conscience. » Se présenter, identifier les hommes-clés mais aussi établir des rapports privilégiés… Cette phase permet au repreneur d’intégrer l’entreprise et d’écouter les aspirations de ses employés.


Comprendre et apprendre de ses salariés

Selon Chantal Prévost, le principal enjeu de la transmission d’entreprise tient dans la recherche constante d’un équilibre : « il faut que tout bouge mais que rien ne bloque. » Si le changement est impulsé par le dirigeant, celui-ci doit fédérer et s’appuyer sur ses salariés pour s’intégrer dans l’entreprise.


Peur de l’avenir et tentation du passé

Les salariés doivent eux aussi faire le deuil du passé pour accepter le changement de direction. Ce mécanisme naturel n’est pas forcément aisé : « Le changement de dirigeant bouleverse les équilibres établis et fait resurgir la relation de chacun à l’autorité. Certains employés se sentent abandonnés par leur ancien patron, d’autres se sentent trahis ou ont l’impression de trahir leur ancien dirigeant en collaborant avec le nouveau » indique Chantal Prévost. « Ils ont également peur que le repreneur ne voie pas leur vraie valeur et remette en cause leur rôle au sein de la structure. Au lieu de redoubler d’énergie et de la déployer pour le bien de l’entreprise, ils se replient donc sur eux-mêmes. » L’essentiel du travail d’observation consiste donc à rassurer les salariés en leur montrant que l’on estime le travail de l’ancien dirigeant et en misant sur l’écoute et la communication.


Créer un lien d’intimité

Selon Jean-Bernard Peylet, la période d’observation n’est pas une phase passive : « Il ne faut surtout pas se couper des salariés, surtout si l’on n’est pas issu du métier. Le nouveau chef d’entreprise doit sortir de son bureau et rencontrer tous les salariés. En allant à la rencontre de chaque employé sur son aire de travail, il saisit mieux ce que ses équipes vivent au quotidien, initie une relation de confiance, de respect mutuel et ouvre le dialogue. Loin du formalisme de la convocation dans le bureau de la direction, rencontrer un vendeur dans ses rayons permet également de créer un lien d’intimité et de délier les langues. Ce contact permet au dirigeant non seulement de vérifier les dires du cédant mais aussi de récolter des informations cruciales sur le management, le fonctionnement de l’entreprise et les vieilles rancœurs et tensions qui peuvent ressurgir à tout moment et parasiter l’ambiance. En général, les salariés sont rassurés et enchantés de cette démarche : ils se sentent écoutés et attendent tous impatiemment leur tour de travailler avec le nouveau patron à leur poste de travail. »


Prendre les rênes de l’entreprise

Prendre possession des emblèmes de pouvoir

Le bureau, la voiture de fonction et la place de parking… Ces trois éléments a priori anodins permettent d’ériger le repreneur au rang de dirigeant de l’entreprise. « Le repreneur doit à tout prix s’en emparer pour réellement s’affirmer face à l’ancien dirigeant et prendre sa place au sein des habitudes des employés », explique Florence Bouis, coach d’entrepreneur. L’abandon du bureau par le cédant n’est jamais évident : « Cette pièce est un lieu d’identité, un repère pour les salariés mais aussi un repaire où le chef d’entreprise a tendance à se cacher pour réfléchir ou lorsqu’il fait face à des difficultés familiales », précise Chantal Prévost.


Trouver sa voie/voix

Dans toute succession, l’héritier doit s’approprier les biens transmis tout en trouvant la bonne distance par rapport à ce qui l’a précédé. « Il est primordial de ne pas désavouer complètement l’ancien patron », souligne Philippe Pailot, maître de conférences à l’IAE de Lille. Pour autant, la tentation du mimétisme est également un piège à éviter selon Chantal Prévost : « Il ne faut pas trop se concentrer sur l’ancien dirigeant. Pour faire évoluer l’entreprise, le repreneur doit avant tout trouver sa propre valeur ajoutée. » La différence culturelle entre le cédant autodidacte et le repreneur diplômé peut alors s’avérer un atout : nouveau carnet d’adresse, aisances en anglais… Le repreneur peut ouvrir un nouveau marché à l’entreprise et lui insuffler une énergie nouvelle.

Ariane Gaudefroy

Crédits photo : Fotolia

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