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COMPTES BANCAIRES DETENUS A L'ETRANGER

Publié le 15/10/2009

Suite au battage médiatique qui va crescendo, et aux "effets d'annonce et de manche" des Pouvoirs publics, notamment à l'égard des citoyens français qui possèdent des fonds placés sur des comptes bancaires "suisses", il apparaît opportun de recentrer le débat afin de permettre aux contribuables concernés de mieux s'y retrouver.

Plus précisément, il convient de procéder d'abord à un rappel des obligations fiscales en matière de placements financiers à l'étranger, puis de préciser les conditions dans lesquelles les contribuables mal conseillés ou moins bien inspirés ont la possibilité d'éviter les foudres de l'Administration fiscale.

I. RAPPEL DES OBLIGATIONS FISCALES EN LA MATIERE

Contrairement à ce qui est sous-entendu depuis pas mal de temps (en raison d'un manque d'explications sérieuses, sans parler de celles et ceux qui traitent du sujet sans le dominer vraiment), les contribuables qui disposent d'un compte bancaire à l'étranger, que ce soit dans un paradis fiscal ou non ..., ne sont pas tous visés par les menaces qui planent.

C'est ainsi que parmi eux, même s'ils s'avèrent peut-être minoritaires, des résidents imposables en France ont régularisé leur situation dès le départ ... tout bonnement en application du respect des dispositions fiscales qui ne datent pas d'aujourd'hui !

En d'autres termes, certains de nos compatriotes ont déclaré les références de leur compte bancaire ouvert à l'étranger, lors du dépôt de leur déclaration de revenus suivant l'année au cours de laquelle ils avaient procédé à son ouverture (conformément aux articles 1649 A. 2ème alinéa du Code général des Impôts et des articles 344 A. et 344 B. de l'annexe III. audit Code, particulièrement explicites au regard de cette obligation, qui précisent "que les sommes transférées à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés, constituent sauf preuve contraire, des revenus imposables").

La déclaration est effectuée en principe à l'aide de l'imprimé n°3916, mais elle peut être établie tout simplement sur papier libre.

Corrélativement, depuis le 1/1/2009 et dans le prolongement des règles existant déjà à l'intérieur de la Communauté européenne, les transferts de sommes vers l'étranger ou en provenance de l'étranger constituent aussi sauf preuve contraire, des revenus imposables lorsque le contribuable n'a pas procédé à la déclaration (en 3 exemplaires) auprès du Service des Douanes de la frontière, de chaque opération supérieure à 10 000 €.

Cette obligation résulte des dispositions des articles 1649 quater A. du C.G.I. et respectivement, des articles 344 I bis. de l'annexe III. et 164 F novodecies B. de l'annexe IV. audit Code.

Par conséquent, l'invitation à la régularisation prônée par les responsables de Bercy, relayée tous azimuts avec plus ou moins de professionnalisme par les médias - surtout avides d'audimat, et même complices dans une certaine mesure, de l'angoisse provoquée chez les citoyens honnêtes -, concerne exclusivement et concrètement les contribuables qui n'ont pas déclaré en temps utile les références de leur (s) compte (s) bancaire (s) ouvert (s) à l'étranger, en Suisse ou ailleurs.

Et au passage (sans mauvais jeu de mots avec telle ou telle frontière), Madame ou Monsieur X peut et pourra toujours ouvrir un compte dans le pays de son choix, à condition de respecter ses obligations déclaratives en la matière, ne serait-ce que pour participer à faire jouer naturellement la concurrence entre les Banques, et plus largement, en raison de la notion de liberté individuelle.

Bien évidemment, en raison d'une certaine tradition bien ancrée au sein de l'Administration française, le contribuable qui joue le jeu en déclarant les références du compte bancaire concerné possède de manière très paradoxale, des chances supplémentaires de faire l'objet d'un contrôle fiscal (soit plus précisément, un examen contradictoire de situation fiscale personnelle).

En effet, l'information "toute cuite" communiquée spontanément à l'appui de la déclaration de revenus peut encourager le fisc à subodorer, à tort ou à raison, qu'il y aurait un "pactole" à récupérer sur le compte bancaire en question ... quitte bien entendu à omettre, car les enquêtes s'avèrent plus longues et plus fastidieuses, de courir après "le plus débrouillard" qui a organisé scientifiquement avec beaucoup d'habileté, sa fuite en avant.

Mais même dans l'éventualité d'un contrôle fiscal, le contribuable ne risque aucun redressement quelconque par rapport aux mouvements enregistrés sur ce compte, si ceux-ci sont justifiés (virements d'un compte bancaire ouvert en France, vente d'un bien immobilier, de titres, etc ...).

Les choses remises en place, venons-en à présent aux problèmes auxquels sont confrontés les autres contribuables ...

II. SORT RESERVE A CEUX QUI ONT ETE MAL CONSEILLES OU QUI ONT ETE MOINS BIEN INSPIRES

Pour aller à l'essentiel, il faut évoquer les deux principales situations - même s'il peut exister des cas intermédiaires - dans lesquelles peuvent se trouver les contribuables qui n'ont pas déclaré les références de leurs comptes ouverts à l'étranger :

1. Les mouvements figurant sur le compte bancaire en cause n'ont aucune origine "douteuse"

C'est à dire que le contribuable est en mesure d'apporter les preuves des sommes qui y sont créditées (conf. ci-dessus pour les virements de comptes financiers ouverts en France, etc...).

Dans ce cas de figure, le seul intérêt pour lui à se rapprocher de la cellule de régularisation consiste à vouloir "dormir tranquille" au lieu d'attendre un éventuel contrôle fiscal pouvant survenir par rapport à l'information relative à l'existence de son compte bancaire "étranger" (qui risque de parvenir à l'Administration fiscale française un jour ou l'autre, en raison d'une probable évolution législative internationale plus rigoureuse).

Et même si le contribuable n'a rien à se reprocher quant à la nature et l'origine des mouvements bancaires concernés, subir un examen contradictoire de situation fiscale personnelle (E.S.F.P.) ne constitue pas, loin de là, une partie de plaisir !

De plus, en jouant "cartes sur table", l'intéressé n'aura à régler que l'amende fiscale par compte non déclaré, prévue à l'article 1736.- IV. du C.G.I. (750 € antérieurement à l'année 2008, puis depuis ladite année, 1 500 € ... ou 10 000 € ! si le compte bancaire non déclaré a été ouvert dans un Etat ou Territoire qui n'a pas conclu avec la France une convention d'assistance administrative).

2. Les mouvements figurant sur le compte bancaire en cause ont une origine "douteuse"

Dans cette hypothèse, soyons clairs ...

Un rapprochement avec la cellule de régularisation de Bercy entraîne des conséquences au plan financier, quasiment à égalité parfaite avec celles correspondant à un contrôle fiscal.

Avant d'évoquer le "prix à payer" suite à une telle démarche, il convient de préciser à toutes fins utiles, que les menaces de poursuites pénales - relayées aussi allègrement par les médias - qui pourraient être envisagées en cas de "non-repentance", ne sont susceptibles d'être engagées qu'à l'occasion de la constatation d'une fraude fiscale organisée délibérément et d'ampleur conséquente.

Au regard des incidences financières proprement dites, les règles du jeu paraissent limpides ...

Le fisc se réserve la possibilité de taxer directement à l'Impôt sur le revenu et aux diverses contributions sociales (*) l'intégralité des sommes enregistrées sur le compte bancaire "étranger", et ce, pour l'ensemble des années non prescrites (soit par exemple jusqu'au 31/12/2009, au titre de chacune des années 2008, 2007 et 2006).

Sauf à démontrer que les fonds en cause ne se rapportent pas à des revenus à caractère imposable (mais n'oublions pas qu'on se situe dans le 2ème cas de figure ...), les Inspecteurs de la cellule de régularisation exigent alors immédiatement le paiement des Impôts résultant du "principe-couperet" évoqué ci-dessus, sans parler des intérêts de retard et de la majoration de 40% ou 80% !

(*) et même à la TVA en cas de sommes encaissées dans le cadre de l'exercice d'une activité professionnelle, à caractère occulte ou non.

Sans que cela ne soit dit officiellement, le seul espoir de "limiter la casse" réside dans le fait qu'avec un bon Avocat (c'est le cas de le dire), le contribuable a peut-être la faculté d'obtenir un échelonnement de la "note à payer", voire un allégement de celle-ci au terme d'une transaction, mais le "vent ne souffle pas" du tout en faveur des repentis fiscaux, et la remise risque d'être très, très relative ...

III. CONCLUSION

Hormis le risque de poursuites pénales qu'encourt le contribuable qui a dissimulé des revenus très importants, non déclarés, grâce à l'utilisation de son compte bancaire "étranger", la décision de venir se "confesser" ne comporte aucun avantage au niveau strictement financier.

Et comme personne n'est sûr de figurer sur telle ou telle liste obtenue à la suite des diverses pressions en tous genres à l'encontre de certaines banques et autres pays "paradisiaques", le contribuable qui dispose de fonds dont la nature et l'origine sont "douteuses" a plutôt intérêt à attendre un éventuel E.S.F.P., car les Agents des Impôts ne vont pas pouvoir tout vérifier ...

Car, et c'est la seule grosse erreur de stratégie commise par Eric WOERTH, celui-ci "a tellement promis" de réclamer aussitôt aux contribuables qui feraient leur "mea culpa", des impositions avec les pénalités y afférentes, équivalentes à celles qui résulteraient d'un contrôle fiscal (au lieu de laisser entendre qu'il y aurait quelques arrangements possibles ... quitte à n'accorder au final, aucun cadeau !), que les volontaires risquent fortement de se décourager.

Cabinet ASTRAIA CONSEIL

Françoise Cavallé

Avocat Fiscaliste

Partenaire CessionPME